Chapitre 14 - Maladie

Publié le par Spike


    Début janvier 1997, Tao commença à ressentir une grande fatigue.
En réalité, cela faisait quelques mois qu’il se sentait souvent très fatigué, sans raison apparente, mais il n’en avait parlé à personne. Anna pensait qu’il travaillait trop, qu’il devait peut-être arrêter quelques temps de faire ses gardes de nuit à l’hôpital.

    « Tu penses que je suis devenu trop vieux pour ça ? A 55 ans, tu as peut-être raison, je ne tiens plus les nuits blanches ! »

Néanmoins, en tant que médecin, Tao savait que cette fatigue là n’était pas normale et il décida d’aller consulter un confrère pour passer quelques examens. Anna commençait à s’inquiéter car à part une grippe ou deux, Tao avait une excellente santé.
Tous deux décidèrent de ne pas en parler aux enfants pour ne pas les inquiéter.


    « Ce n’est sans doute que passager, ça va aller, je vais juste essayer de ralentir le rythme... »

    Cependant, un dimanche de mars, alors que toute la famille était réunie, Tao annonça à ses enfants :

    « Vous avez sans doute remarqué que j’étais très fatigué ces derniers temps... je ne sais pas encore ce que j’ai, mais je vais aller voir un médecin pour faire des examens plus poussés...»

Kiêm lui dit :

« C’est drôle, on ne t’a jamais vu malade. D’ailleurs, c’est toi le médecin qui nous soigne quand nous on est malade, et toi, tu te soignes tout seul? Qui te soigne ?
- Et bien, ce sont d’autres médecins...
- Mais tu peux diagnostiquer tout seul ce que tu as ou non ? demanda Hoan.
- C’est peut-être un peu plus compliqué que ça... j’ai besoin d’aller voir des professeurs, d’autres personnes... je ne sais pas ce que j’ai. »

    Kim Yên qui écoutait sans rien dire lui lança de façon abrupte:

    « Alors là, ça m’étonnerait bien que tu ne saches pas ce que tu aies, tu es un très bon médecin, quand j’étais petite, j’avais eu une maladie très rare que toi seul tu as diagnostiqué, alors je suppose juste que tu ne veux pas nous dire ce que tu as, c’est tout. »

Elle lâcha finalement, tout en se forçant presque à être ironique:

    « Tu ne vas quand même pas nous sortir que tu as un cancer j’espère ? Ce serait la meilleure ! »

Il y eu un silence gêné, ni Anna ni Tao ne répondirent, et Kim Yên était certaine que son grand frère pensait comme elle.
Tao dit finalement :


    « Je vais aller faire des examens très prochainement, justement pour déterminer précisément ce que j’ai. Je n’ai pas envie de vous alarmer pour rien. Je veux simplement vous avertir que pendant quelques temps, je serai sans doute plus souvent à la maison, et moins à l’hôpital, puisque je ne suis pas en état d’aller travailler autant qu’avant. »

    Les jours qui suivirent, les enfants évitèrent le sujet avec leurs parents, et attendirent que leur père leur en dise plus.
Ironie du sort, Tao se fit hospitaliser le 1er avril pour subir toute cette fameuse série d’examens.
Anna passa chez Kim Yên, qui avait quitté la maison depuis quelques temps, juste après qu’elle ait eu les résultats de Tao.
Vers 16h, elle sonna à l’appartement :

    « Alors ? Papa sait ce qu'il a? Vous savez?
- Oui on sait. »

Anna s’assit et prit la main de sa fille :

    « Ecoute... je sais que tu savais déjà... et ton père aussi savait... les médecins lui ont bien diagnostiqué un cancer.
- ...
Maman, c’est la blague du 1er avril là ? C'est complètement nul!

- Non. »

    Les larmes se mirent à couler toutes seules sur leurs joues, Kim Yên attendit quelques minutes, et puisque sa mère ne se décidait pas à parler, demanda finalement en redoutant la seule réponse qu’elle attendait:

    « Mais... c’est un cancer qui se soigne non ? Forcément ? »
Sa mère secoua la tête et ses larmes redoublèrent.
    « Justement... pas celui là... »

    Mère et fille pleuraient ensemble et n’osaient plus parler. Combien de mois ou combien de jours restait-il ? Pourquoi lui ? Et surtout, pourquoi maintenant ? Elle posa finalement à Anna une question complètement absurde :

    « Mais ce n’était pas marqué dans le carnet de naissance de Papa? Madame Lâm n’avait pas prédit ou noté que sa vie s’arrêterait là, dans quelques mois?»

    Anna esquissa un sourire et répondit :

    « ça t’a marqué ce carnet... Ton père n’aurait jamais dû vous en parler, surtout à toi, il était sûr que ça te toucherait... il me l’a dit... il savait que tu prendrais cette histoire de prédiction très à cœur...
- Mais alors ? Il le savait ? Depuis qu’il l’avait lu ? Il le savait ? Et toi aussi ????
- Ecoute... maintenant ça n’a pas vraiment d’importance ce qu’il y avait d’écrit ou non dans ce carnet... il va falloir être fort... tous... et l’aider à traverser cette épreuve. Nous devons tous être là...
- Mais pour combien de temps ? 2 ans ? 5 ans ?
- ... Malheureusement moins que ça certainement... »

    Elles allèrent en fin d’après-midi à l’hôpital. Au delà de la nouvelle qu’elle avait apprise dans l’après-midi, Kim Yên était très choquée de voir son père en tant que malade dans un hôpital, elle qui ne l’avait toujours vu qu’en tant que médecin. Elle s’était promis de tenir le coup devant lui.

    « Tu es venue... bonjour »... Tao était fatigué mais sourit à sa fille.
« Il ne faut pas que tu sois triste... ça va aller... je vais essayer de tenir le plus possible pour rester avec vous, ne t’inquiète pas...
- Mais non ça va pas... Maman m’a tout dit... ça va pas...
- Je vais rentrer à la maison après demain, on en parlera...
- Mais pourquoi tu as cette maladie ? Ce n’est même pas logique étant donné la vie que tu as ! Tu ne fumes pas, tu ne bois pas, tu as une bonne hygiène de vie, comment c’est possible ? C’est complètement injuste !
- J’ai quelque chose au colon et au foie... mais tu sais... peut-être qu’on peut me soigner finalement, peut-être que je pourrai être opéré et ça ira bien... ne t’en fais pas... La médecine a fait beaucoup de progrès pour soigner les cancers...»

    Kim Yên avait toujours eu une confiance aveugle en son père et ses diagnostics : puisqu’il lui disait qu’il y avait peut-être une possibilité, même infime, alors ça signifiait qu’elle était réelle. Il savait après tout.
Elle partit une demie heure après, quand son père eut enfin réussit à la rassurer, mais une fois dans le couloir de l’hôpital, elle ne put se retenir plus longtemps et fondit en larmes.

    Anna resta avec Tao jusqu’à la fin de la journée.

    « Je ne pouvais pas lui dire que j’ai un cancer incurable... ça me rend tellement triste de la voir comme ça.
- Mais elle sait... enfin elle se doute...
- Je sais qu’elle sait... mais il faut lui laisser du temps... c’est trop tôt,  elle ne peut pas accepter ça d’un seul coup. C’est trop difficile. »

    Rentrée chez elle, Kim Yên prit une décision : puisqu’il fallait dorénavant compter les jours, elle décida qu’elle ne le ferait pas et personne ne lui enlèverait cette idée de la tête. Elle se raccrocherait aux dernières paroles de son père.
«Il y a peut-être un espoir.»

    Elle avait beau retourner le scénario dans tous les sens, à la fin de son histoire à elle, il était inimaginable, tout simplement impensable que son père ne soit déjà plus là.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
V
Ma chère Géorgienne je carbure à l'eau et à la substance licite. <br /> <br /> Et si tu t'étais appelée Vanessa, tu aurais été une jeune fille bien chanceuse.<br /> <br /> (sauf quand on t'aurait sorti "ah ouais j'ai les dessous mouillés Vanessa"....)
Répondre
S
@ Valérie: l'année prochaine, je prends un mois de vacances pour voyager en France du Nord.<br /> (au moins là bas, pas de mousson, pas de tigre, de moustiques, d'eau pas potable etc...)<br /> <br /> @ Vanessa: toi si ça continue tu vas être punie, y'en a plus que marre, ce blog deviens n'importe quoi et c'est en partie à cause de ton attitude dissipée.<br /> <br /> @ La Géorgienne: tu te serais appelée Vanessa et t'aurais<br /> été toute pourrite. (comme elle quoi)<br /> <br /> @ Calou: :) ça me fait plaisir tu sais! Je sais pas si la porte est toujours vert foncée...<br /> Sinon c'est chouette le Jardin Public...<br /> <br /> @ Silphi: nan pas Judaïque, SUIS UN PEU MERDE ENFIN QUOI! c'est Fondaudège.<br /> (ça me fait penser à "Fondue à la Neige", j'adore ce nom)
Répondre
S
Merde j'avais pas fait gaffe, le 103...c'est rue Judaïque ??
Répondre
C
Rhaaa...C'est triste...<br /> Que dire de plus....<br /> <br /> Spike je suis passé au 103 et j'ai eu une pensée pour Tao et Anna....Joli endroit près du Palais Gallien et du Jardin Public...
Répondre
L
LA GéORGIENNE ne fait pas de claquettes, La Géorgienne est CHARETTE !!!!<br /> et elle va se coucher...<br /> et Vanessa est en forme...<br /> A quoi elle carbure Vanessa ? J'en veux.<br /> Quand j'étais petite je voulais m'appeler Vanessa...
Répondre